Pour une politique publique de rénovation thermique du bâti

Patrice Leclerc
Gennevilliers

Conseil municipal du mercredi 8 février 2023

Lors des élections présidentielles de 1974, René Dumont avec son devenu célèbre verre d’eau alertait sur la dynamique déjà existante, d’un dérèglement climatique. A la fin des années 80, les scientifiques mettaient en évidence une causalité entre l’utilisation des énergies fossiles et ce phénomène. A la même période une étude du pétrolier Exxon Mobil confirmait cette causalité, allant jusqu’à prédire un réchauffement climatique de 0,2° par décennie. Cette prédiction s’est malheureusement vérifiée.

La loi du profit qui ne se donne jamais de limite, choisira alors le cynisme d’une campagne de tromperie publique plutôt que la responsabilité relative à la défense du vivant. Quant aux gouvernants, comptables de l’intérêt général, ils ont fermé les yeux.

Depuis un demi-siècle le dérèglement climatique, ses causes et ses conséquences sont plus que connus. Un demi-siècle de perdu ça n’est pas rien pour freiner une dynamique dont l’accélérations est de nature cumulative. Comment ose-t-on, dans ces conditions, imaginer que la pérennité du vivant attende son tour dans une hiérarchie des priorités ?

Nous ne pouvons plus admettre que 15 ans après le Grenelle de l’environnement, les gouvernements toujours aux ordres des lobbies cherchent à gagner du temps pour protéger leurs profits. Alors, plutôt que d’adopter une stratégie rigoureuse construite sur des réalités objectives, ils ont choisi les ressorts de la subjectivité. Leurs sondages noient la responsabilité des profiteurs en choisissant d’en faire l’un des paramètre une « activité humaine » globale comme cause du réchauffement climatique. Cette présentation qu’on adopte facilement est en réalité assez vicieuse. En inversant les causes et les conséquences, on mobilise aisément le sentiment de culpabilité. L’addiction à la consommation serait ainsi la cause. On subordonne ainsi les solutions aux comportements individuels. En s’attaquant sans cesse aux symptômes, on laisse le mal prospérer.

Mettant ainsi les lobbies à l’abri, ce récit construit sur l’addiction des populations, propage l’idée d’une écologie ne proposant que « du sang et des larmes ».

C’est ce cynisme qui est derrière les politiques réparatrices alliant culpabilité et pressions financières imposées aux plus modestes. La fameuse ZFE en est un exemple emblématique. Elle se construit en effet, sur un raisonnement simpliste : Il y a de la pollution, alors supprimons les voitures les plus anciennes ! Mais par ailleurs, les aides ne sont pas prévues, les modes de transports alternatifs n’y sont pas corrélés. L’objectif est bien de rendre contraignantes et sans plus-values les mesures relatives à l’environnement.

Faire l’impasse sur l’accompagnement nécessaire à la mise en œuvre d’une politique écologiste, ne s’appuyer que sur les efforts des plus modestes, c’est évidemment envoyer le message que l’écologie n’est pas pour le peuple, voire qu’elle est contre lui. Il faudrait subir cette culture dominante, qui n’intègre jamais les conséquences sociales de sa politique.

Or, cette crise climatique est en vérité la plus grande crise sociale que l’Humanité ait jamais connue. Aussi, la défense du vivant et la justice sociales doivent-elles être indissociables !

S’attaquer aux causes imposerait d’en finir avec les mesurettes et petits pas punitifs, pour déterminer une trajectoire politique débouchant sur une planification.

Ça n’est évidemment pas l’intérêt de ceux qui tirent profits de l’industrie polluante, de l’agriculture non-raisonnée et de l’exploitation sans limite des ressources. Ça n’est d’autant pas leur intérêt qu’ils auraient à choisir entre payer les dégâts causés, ou investir dans la transformation du modèle économique et de production. La justice sociale serait en effet de ne pas faire porter la charge par le contribuable.

On retrouve cette problématique dans la rénovation thermique du bâti. Ce dernier produit 20% de la pollution. Or, au rythme actuel de la réponse gouvernementale il faudrait plusieurs siècles pour atteindre le terme. Comment ose-t-on substituer un message de communiquant à une programmation politique, quand les enjeux sont vitaux ?

Ces enjeux demandent en effet une orientation posée comme principe fondateur d’une politique qui impose:

  • un plan de financement public compensé par une juste distribution de l’impôt,
  • des objectifs de réalisations à l’échelle nationale
  • et un temps défini.

A ce principe posé comme étant incontournable, suivrait le stade de la négociation. Il porterait sur la réalité des paramètres directs et induits, ainsi que sur les priorités de mise en œuvre.

Ce stade est extrêmement important, sa réussite dépendant de la forme démocratique de la négociation, des arbitrages budgétaires imposés ou consentis, et de sa capacité à protéger l’orientation politique des complications qui autoriserait à réduire l’ambition.

Les priorités et les financements seront alors influencées par la convergence des paramètres induits et par le choix d’une écologie qui soit sociale.

Aussi faudrait-il commencer par rénover les logements des plus modestes (locataires de l’habitat social, du privé, petits propriétaires, etc.) et militer pour un financement public qui réduirait les charges.

Il faut ici s’intéresser à la nature de la ressource publique.

Devrions-nous tergiverser vis-à-vis d’un modèle de ressources publiques qui serait gravé dans le marbre, pendant que nous sommes confrontés à une catastrophe climatique qui va en s’amplifiant ? Devrions-nous tergiverser quand chacun sait combien il est inégalitaire, combien il asphyxie les plus pauvres et les classes moyennes, combien il concentre une incalculable accumulation de richesses pour certains ? Devrions-nous tergiverser quand notre démocratie présente autant de similitudes entre une classe légitime à s’approprier les profits et une oligarchie qui les confisque sous la protection d’un dictateur ?

Ce qu’il est possible de proposer n’est pas une nouveauté.

Le XXème siècle a en effet vu un Président Roosevelt imposant aux plus riches une participation solidaire pour alimenter un « new deal ». On retrouve très justement cette référence dans les propositions de la communauté européenne et dans les programmes des partis écologistes.

A la Libération, notre pays exsangue n’a-t-il pas eu un Conseil National de la Resistance qui corrélait une économie de la reconstruction à un contrat social ? La caisse des dépôts n’a-t-elle pas alors accompagné cette reconstruction ? Ne pourrait-elle cesser de servir le développement du business d’une modernité factice pour se remobiliser sur la rénovation thermique du pays qu’elle contribue à rebâtir ?

Comme à ces époques, la situation devrait créer un consensus culturel sur une ambition qui s’impose d’elle-même. Sachant que la Nature n’a que faire des états d’âmes de marchands « court-termistes », une volonté politique est légitime pour mettre en œuvre une écologie sociale.

Aussi :

  • Le conseil municipal demande au gouvernement de proposer une planification relative à la rénovation thermique du bâti qui soit crédible.
  • Le conseil municipal demande que priorité soit faite pour les logements des catégorie modestes (logement sociale, ou privés etc.)
  • Le conseil municipal demande le financement public du programme.
  • Le conseil municipal demande une restructuration égalitaire de l’impôt pour assumer la dette générée.

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